UTOVs SA - Bertrand Yerly
« Il y a encore du potentiel dans la valorisation des déchets »
Comment l’UTO est-elle passée de « destructrice de déchets » à « productrice d’énergie » ?
L’incinération des déchets produit beaucoup de chaleur. Au lieu de la laisser perdre, on la récupère et on compense ainsi nos émissions de CO2. Le mouvement est déjà en marche depuis plus de trente ans, mais il reste peu connu du public. Nous avons commencé à produire de l’électricité pour 10 000 ménages dans les années 1990. Puis, dès 2009, nous avons utilisé cette énergie pour faire fonctionner la production de granulés en bois valaisan (société Valpellets). Le projet qui nous occupe actuellement est celui du chauffage à distance: une chaudière géante raccordée à plusieurs quartiers de Sion. Et plus tard, l’énergie de l’UTO sera peut-être au service d’autres sources d’énergie, comme l’hydrogène.
L’Usine de traitement des ordures du Valais central (UTO) ne se contente pas de détruire les déchets. Elle les valorise! Artisan de cette révolution, son directeur Bertrand Yerly explique comment l’incinération de nos sacs-poubelle est devenue une précieuse source d’énergie.
Quel est votre rôle dans le chauffage à distance en construction pour la région de Sion ?
Nous sommes un maillon du cycle énergétique, entre le producteur de déchet et le distributeur d’énergie. Le citoyen jette son déchet, qui est brûlé ici. L’énergie de la combustion est utilisée pour chauffer de l’eau à 90 degrés, qui est ensuite acheminée via les conduites de Sogaval jusqu’au radiateur du citoyen. Après avoir chauffé les bâtiments, l’eau à 50 degrés revient à l’UTO pour être chauffée à nouveau: la boucle est bouclée !
Les déchets constituent votre matière première. Or, on essaie d’en diminuer la quantité, via la taxe au sac et le tri. En aurez-vous suffisamment pour produire cette énergie à l’avenir ?
Entre l’augmentation de la population, l’activité économique toujours aussi forte et les efforts de recyclage, nous arrivons à maintenir un certain équilibre, mais nous sommes loin d’une baisse. Même si demain, nous devions avoir moins de déchets à incinérer, il y aura toujours autant d’énergie à disposition, voire davantage. Par exemple, les déchets alimentaires qui occupent une grande partie des sacs-poubelle pourraient être systématiquement valorisés sous forme de biogaz. L’UTO a déjà commencé à le faire via sa plateforme GazEl à Vétroz. Il y a encore du potentiel dans la valorisation de ces déchets.
Dans vos déchetteries, vous avez fortement augmenté le niveau de tri des déchets. Pourquoi le plastique n’est-il toujours pas recyclable ?
Il existe des dizaines de sortes de plastique sur le marché. Ils n’ont pas les mêmes composants et ne peuvent donc pas être traités ensemble. A part le PET, il n’y a pas encore de filière de recyclage fiable pour ces matériaux. Il faudrait agir en amont, en limitant la production mondiale à deux ou trois sortes de plastique, identifiables et recyclables. On pourrait aussi le remplacer par des matières réutilisables comme le verre et l’aluminium. En attendant, on peut tenter d’acheter moins de produits emballés. Et espérer que les industriels et les distributeurs prennent leurs responsabilités.
L’UTO fait partie des entreprises Valais excellence depuis 2009. Qu’est-ce que cela vous apporte ?
La possibilité d’échanger avec des entrepreneurs de tous secteurs dans la région. Les rencontres organisées par Valais excellence sont très intéressantes et se déroulent dans un état d’esprit rassembleur qu’on ne trouve pas ailleurs. Cela me permet de partager des idées et des expériences avec d’autres, mais aussi de participer à des réflexions sur certains thèmes qui nous concernent tous. J’en tire toujours quelque chose de positif.
Le chauffage à distance alimenté par l’UTO permettra de chauffer l’équivalent de 10 000 ménages et d’économiser environ 10 millions de litres de mazout par année.
Un entrepreneur au service du public !
Bertrand Yerly a choisi une paire de baskets pour illustrer sa passion pour le trail et sa façon d’avancer dans la vie. Sportif de longue date, il apprécie les moments d’évasion et de solitude en montagne pour recharger les batteries. «Je ne suis pas du genre télé-canapé. J’ai besoin d’être actif, au travail comme en dehors.»
De l’énergie, il en faut pour diriger un site qui ne cesse de prendre de l’ampleur. Bertrand Yerly y est entré comme ingénieur en électrotechnique en 1999 et en a pris les rênes en 2005. Il est donc à l’origine de la plupart des innovations qui ont fait de l’UTO un pôle industriel et énergétique, dont la création de Valpellets, société productrice de granulés de bois local.
Mandaté par une association intercommunale (29 collectivités du Valais central), Bertrand Yerly mène le grand bateau de l’UTO avec détermination et franchise. «Notre société est au service du public, ce qui ne m’a jamais empêché d’agir en entrepreneur. C’est avec cette énergie-là que je vais de l’avant et que je continue à mener des projets.»